Ces dernières années, on a beaucoup parlé de l’interdiction des cigarettes mentholées et de la manière dont elles pourraient potentiellement réduire les taux de tabagisme. Les recherches suggèrent que l'arôme mentholé des cigarettes masque la dureté du tabac avec sa sensation de fraîcheur, atténuant ainsi l'irritation de la gorge causée par le tabagisme. Naturellement, cela facilite le tabagisme, conduisant à une inhalation plus profonde et à une consommation accrue de nic.
De plus, les cigarettes mentholées ont soulevé des inquiétudes en raison de résultats indiquant que le menthol facilite l'absorption du nic, conduisant à une dépendance plus élevée, les fumeurs de cigarettes mentholées étant confrontés à une difficulté accrue à arrêter de fumer par rapport aux fumeurs non mentholés. De plus, les menthols sont souvent commercialisés comme étant plus doux, plus légers et plus rafraîchissants, perpétuant ainsi leur attrait.
Comprendre le rôle du menthol dans le tabagisme est crucial pour mettre en œuvre des mesures efficaces de lutte antitabac et réduire les méfaits liés au tabagisme. Des études récentes ont examiné l'efficacité des interdictions du menthol en analysant les taux de tabagisme dans les endroits où de telles mesures ont été mises en place.
Suite à l'interdiction du menthol, la plupart des fumeurs sont passés à des variantes non mentholées
Un article récent publié dans Nic & Tobacco Research, affilié à Oxford University Press, a exploré l'impact de l'interdiction du menthol sur les taux de tabagisme. À l’échelle mondiale, la prévalence de la consommation de cigarettes mentholées chez les fumeurs varie considérablement. En 2020, 7,4 % d’utilisateurs de menthol ont été recensés en Europe, contre 43,4 % de fumeurs adultes aux États-Unis.
Les cigarettes mentholées sont utilisées de manière disproportionnée par les jeunes, les minorités raciales/ethniques et les fumeurs à faible revenu, avec 81 % des fumeurs noirs non hispaniques aux États-Unis optant pour les menthols, contre 34 % des fumeurs blancs. Plusieurs juridictions, dont plus de 170 villes américaines, deux États, plusieurs pays comme le Canada et l'Éthiopie, ainsi que l'Union européenne, ont mis en place des interdictions sur la vente de cigarettes mentholées.
L'étude actuelle a examiné l'impact de ces interdictions en examinant systématiquement les études publiées en anglais jusqu'en novembre 2022. Les chercheurs ont mené une recherche complète dans des bases de données, notamment PubMed/Medline, CINAHL, PsycINFO, Web of Science et Embase, analysant 78 études antérieures, principalement du Canada, de l’UE et des États-Unis.
Les résultats ont révélé qu'à la suite des interdictions, 50 % des fumeurs mentholés sont passés aux cigarettes non mentholées, tandis que 24 % ont complètement arrêté de fumer. En revanche, 12 % sont passés à d’autres produits du tabac aromatisés, tandis que 24 % ont continué à fumer des menthols. Notamment, les interdictions nationales sur le menthol ont démontré une plus grande efficacité par rapport aux interdictions locales ou étatiques, avec des taux d'abandon plus élevés dans les zones où les interdictions sont appliquées à l'échelle nationale.
Ces résultats suggèrent que la mise en œuvre d’interdictions sur le menthol pourrait entraîner une légère réduction des taux de tabagisme. La plupart des fumeurs viennent tout juste de passer à des produits différents. L'étude a donc souligné l'importance d'envisager des mesures globales tout en tenant compte de leur impact potentiel sur divers groupes démographiques et préférences en matière de produits du tabac.
Les interdictions ne sont pas toujours une solution miracle
D’autre part, une étude récente visant à analyser les tendances du tabagisme des cigarettes mentholées chez les adultes en Grande-Bretagne (GB) après l’interdiction des cigarettes mentholées en mai 2020, a fait état de résultats complexes.
Les données ont été collectées à partir d'une enquête transversale mensuelle d'octobre 2020 à mars 2023. Les chercheurs ont évalué la prévalence du tabagisme de cigarettes mentholées chez tous les adultes et en particulier chez les 18 à 24 ans, ainsi que les différences entre l'Angleterre, l'Écosse et le Pays de Galles. . Ils ont également examiné les sources auprès desquelles les individus achetaient des cigarettes mentholées par rapport aux cigarettes non aromatisées.
Les résultats ont révélé qu'au premier trimestre, 16,2 % des adultes fumant des cigarettes ont déclaré avoir consommé des cigarettes mentholées, et cette prévalence est restée relativement stable tout au long de la période d'étude. Cependant, chez les 18-24 ans, on a observé une baisse du tabagisme de cigarettes mentholées. Plus précisément, la prévalence de la consommation de cigarettes mentholées a diminué des deux tiers au Pays de Galles, mais est restée relativement stable en Angleterre et en Écosse. Malgré l’interdiction, environ un million d’adultes en Grande-Bretagne ont continué à fumer des menthols.
Concernant les sources d'achat, la majorité (93,9 %) ont déclaré avoir obtenu des cigarettes mentholées auprès de sources légales, tandis que 14,8 % les ont obtenues auprès de sources illicites et 11,5 % les ont achetées à l'étranger. Cela suggère soit que de nombreux fumeurs utilisent des additifs pour ajouter une saveur mentholée aux cigarettes ordinaires, soit qu'ils achètent des marques aromatisées au menthol même si elles ne sont pas étiquetées de cette façon.
Il est important de noter qu’il n’y avait aucune différence significative dans les sources d’achat entre les individus fumant des cigarettes mentholées et celles fumant des cigarettes non aromatisées. Dans l’ensemble, l’étude a conclu qu’il n’y avait pas de changements notables dans la prévalence du tabagisme mentholé chez les adultes en Grande-Bretagne après l’interdiction, à l’exception d’une baisse observée chez les jeunes et au Pays de Galles. De plus, la persistance du tabagisme mentholé n’était pas principalement due à des achats illicites, puisque la majorité des individus obtenaient des cigarettes mentholées auprès de sources légales.
Ces résultats indiquent la complexité de la situation, soulignant la nécessité d’une surveillance continue et potentiellement d’ajouts de mesures pour réduire l’accès aux menthols.